S’introduire dans une maison c’était facile. Choisir la bonne proie c’était quelque chose d’autre. Les hauteurs n’étaient pas un obstacle pour sa souplesse et sa force, son corps de jeune homme bien développé lui avait permis de découvrir que frapper quelque chose avec tout son corps faisait bien plus de dégâts que lorsqu’il était un chat. C’était le seul point positif, du reste il avait bien du mal à comprendre quoique ce soit sur ce qu’il était. Il s’était réveillé il y a peu de temps, quelques semaines à peine. Tout ce qu’il avait compris c’est que la lumière du jour était toujours un fardeau pour ses yeux, que la nuit lui était bien plus profitable et qu’il avait cette chose qui lui parasitait sans cesse l’esprit... des... des choses qui passaient encore et encore dès qu’il observait quelque chose. Comme ce que les humains faisaient autrefois quand ils ouvraient la bouche pour émettre ces sons désagréables. Il les avait dans la tête, Chat ne saisissait même pas le principe de ce que cela voulait dire “penser” et ça l’énervait plus qu’autre chose.  

Ce soir il avait décidé de se balader dans le quartier populaire, il avait remarqué que les allées et venues étaient plus nombreuses ici, les gens riches sortaient moins souvent que les gens moins riches... surement parce que les uns avaient besoin d’oublier leur journée et pas les autres ? Peu importe, c’était toujours sa chance que de voir une maison se vider, un appartement s’éteindre et la personne quitter les lieux. Cela faisait quelques heures qu’il guettait dans l’ombre une fenêtre à l’étage, la lumière était éteinte et ne s’était pas allumée une seule fois de la soirée alors il avait déterminé qu’il n’y avait personne dedans. Souriant dans la pénombre, ses prunelles brillant dans l’obscurité en réfléchissant la moindre lumière il s’échappa de sa cachette et grimpa souplement le long de la paroi de l’immeuble, côté ruelle pour éviter d’être vu, arrivé au niveau de la fenêtre il prit appuie sur la barrière une seconde, enroulant sa main dans un tissu, ça aussi il l’avait appris à ses dépens, le verre ça coupe.  

Puis sans hésitation il enfonça son poing couvert dans la vitre, en explosant la protection éphémère puis sauta souplement à l’intérieur de l’appartement, reprenant son souffle après cet effort qu’il avait dû pratiquer de nombreuse fois sans se tuer, mais après tout le chat n’était-il pas l’animal de l’impossible ? Souriant largement il examina les lieux et fut plus que déçu de la teneur des lieux. Cet endroit semblait à peine habité ! Il espérait au moins trouver de quoi manger dans la boîte froide mais fut bien déçu d’y trouver le même vide que son estomac. Furieux il tacla la chaise qui traînait par là et retourna toute la cuisine jusqu’à trouver les gâteaux, c’était mieux que rien. Il dévora tout ce qu’il trouva de comestible puis entrepris de retourner le reste de la maison. Peut-être y’avait-il d’autre gâteaux cachés quelque part ?  

Curieux il arriva près du lit, retourna ce dernier sans succès puis ouvrit la commode et en sorti son contenu, découvrant quelques babioles brillantes sans intérêts, des trucs jaunes et... jaune pâle ? Et puis d’autre bleu. Bref rien d’intéressant, rien qui ne se mange ! Sa queue battait violemment l’air de frustration, il détestait dépenser sa si précieuse énergie pour rien ! Surtout quand le trou du cul qui vivait ici était infoutu d’avoir de quoi manger correctement ! Agacé, il attrapa un des trucs brillant et long et le balança contre le mur puis alla fouiner dans la salle de bain sans plus de succès. Ce fut quand il entendit un bruit de clé, ses oreilles se dressant sur sa tête avec attention qu’il remarqua qu’il était resté ici depuis longtemps à tout fouiller... peut-être même trop longtemps. Merde.  

Le bruit de la clé, voilà ce qu’il arrêta dans son passage à tabac de l’oreiller innocent, un silence il resta alerte et regarda autour de lui attentivement, finalement il le vit franchir la porte et refermer derrière lui, détendu et nullement impressionné par la présence du Chat dans son appartement, il s’exclama avec aisance et tranquillité mais le Chat se fit la réflexion que cet homme ne parlait pas il écrivait un roman, roulant des yeux, un geste très humain qu’il avait adopté très vite. Le jeune homme recula jusqu’à un coin de la porte celui donnant sur la fenêtre ouverte, se ramassant sur lui-même comme un animal pris au piège et gronda ses oreilles se plaquant sur son crâne. Son seul avantage pour le moment c’était qu’il voyait mieux que l’homme dans le noir de son appartement et qu’à tout moment il pouvait tenter à saut par la fenêtre.

Jetant un coup d’oeil à l’extérieur, il revint intérieurement sur ce dernier point, s’il sautait il cassait quelque chose dans ce corps trop peu pratique, car bien qu’il eût gardé une souplesse féline extraordinaire il n’en restait pas moins en parti humain. Sa queue émis un son répétitif alors qu’il fouettait le mur de cette dernière puis finalement le Chat réalisa les mots de l’homme et se redressa petit à petit. Il le prenait pour un voleur ? Non il n’y était pas il ne volait rien, il cherchait à manger. Grondant dans sa gorge il ouvrit la bouche, ses petits crocs en avant et essaya d’émettre un son

-Hg... ha... gnh...

Bordel ! Pourquoi était-ce si dur de parler ? Peut-être parce qu’il ne l’avait jamais fait avant et que même si sa gorge en était maintenant capable il ne comprenait pas du tout le principe, comment cela fonctionnait-il ? Feulant, sa main se leva pour pointer la cuisine et comme un signe du ciel en sa faveur –il fallait bien de temps en temps- son ventre se mis à gargouiller méchamment signalant à l’homme présent que le Chat n’en avait cure de ses objets de “valeurs” à plus forte raison il ne savait même pas ce que c’était. Il avait juste faim, comme n’importe quel chat d’égout vivant depuis trop longtemps dans la rue. Méfiant, mais détendu face au manque d’agressivité de l’homme, il se sorti lentement de sa torpeur effrayée et s’approcha de lui, pas à pas, avec une lenteur volontaire et inquiète. Une fois à distance préférentiel, ni trop près ni trop loin, il étudia un peu l’attitude de l’homme, détendu, joueur. Il semblait se trouver dans une situation qui l’amusait, ou bien était-ce le chat lui-même qui l’amusait ? Dur à dire sachant qu’il n’avait aucune idée de ce que cela signifiait “s’amuser”. L’air de rien, le Chat resta près à lui sauter dessus pour défendre sa vie s’il faisait montre de la moindre agressivité et il lui fit comprendre en relevant la lèvre et en grondant longuement. Il n’était pas Chat à se laisser faire, plus maintenant, et de toute façon vu la malédiction qu’il se traînait si l’homme prenait le temps de s’en prendre à lui il risquait de le regretter plus que le Chat.

Reculant à nouveau, il s’approcha de la fenêtre et commença à franchir cette dernière dans l’optique de partir, après tout il avait bien vidé la maison et il n’y avait rien à manger.