Groupe — Créations
Oeuvre originale — Crime et Châtiment de Fyodor Dostoïevski
Date d'arrivée — 6 mois.
Métier — Libraire.
Avatar — Keith Kogane, Voltron.

Rodia, t'avais tout pour réussir. Tu te souviens de la lettre de ta mère, comme t'as pleuré avant de l'ouvrir. Tu sais que t'es en train de foutre en l'air tout ce qu'elle avait prévu pour toi. Elle et Dounia, ta soeur aussi, qui se tenait à la merci d'un sale homme pour toi, pour que tu puisses étudier. Parce que t'es brillant, Rodia. Ça crève les yeux. T'as toujours été de ceux-là, les rationnels, les intellectuels. Tout ce que t'avais à faire, c'était prendre l'argent, jusqu'au dernier rouble, et t'éduquer. Mais toi, t'as jamais rien demandé. Ça te dégoûtait, de les voir sacrifier leur vie pour la tienne. Tu n'en pouvais plus de voir Dounia subir les pire atrocités pour toi. En plus elle te ressemblait tellement. Elle aurait beaucoup plus aimé Saint-Pétersbourg que toi, c'est certain.

T'aurais pu devenir quelqu'un de grand. Mais au fond, était-ce ce que tu voulais réellement ? Quelqu'un de grand ? Non, ce n'était pas assez fort. T'avais en tête de devenir Napoléon. Oui, t'aurais voulu être Napoléon, mais t'es pas un guerrier, et encore moins un soldat. Ah, c'est ce que tu croyais. Parce qu'au final, t'as pas eu peur de faire couler le sang.

Mais tout le monde la détestait, non ? La vieille d'à côté, comme un dragon, qui couvait son or, les possessions les plus précieuses des pauvres du coin, des victimes de la misère russe. Et toi, tu lui avait même laissé la montre de ton père. Ton père, qui a rendu l'âme. Des fois, tu te rappelles cette promenade avec lui, où vous étiez tombés nez à nez avec un cheval en train de se faire torturer par son maître. On ne peut rien y faire, qu'il te disait.

Pour devenir Napoléon, c'était simple. Commettre un mal pour un plus grand bien. Tuer la vieille usurière et s'emparer de son butin pour le redistribuer. C'était noble, pas vraiment un crime. Mais alors pourquoi est-ce que t'hésitais autant ? T'hésitais, quand l'occasion en or s'est présentée. Alors Rodia, tu l'as fait. Tu t'es emparé d'une hache, t'es allé chez elle et tu l'as tuée. Un solide coup de hache dans le crâne. Aussi simple que ça... Vraiment ?

Bien sûr que non. Il a fallu que sa soeur rentre à sa suite, et tu l'as tuée aussi. Ce n'était pas prévu. Sa soeur, elle n'avait jamais rien fait de mal. Bien au contraire. Presque une sainte. Et toi, tu l'as tuée, tout aussi vulgairement, d'un seul mouvement.

Et t'as plus jamais été le même. T'as à peine réussi à mettre la main sur un petit sac d'argent, à le cacher, et à retourner agoniser dans ta chambre miteuse. Tu t'es couché, t'es resté là longtemps. Allongé, avec la culpabilité qui te rendait malade, te faisait perdre connaissance, qui t'empêchait d'affronter le monde. Y'a bien ton meilleur ami qui venait te voir, mais il ne comprenait pas. T'avais les mains et l'âme souillées, la conscience troublée. C'était ton châtiment. Et pourtant, t'aurais pas voulu mourir. Tu préférais encore vivre une vie de misère, rongé par ton crime. Peut-être était-ce parce que tu savais que t'étais condamné. Tu te sentais comme un condamné à mort, et alors, tu te raccrochais à tout, à n'importe quoi.

Puis il y a eu cette femme. Qui te pardonnait tout. Elle savait tout de toi, tes péchés les plus sales, et pourtant elle s'agenouillait devant toi. T'as pas tout compris. Mais elle te disait d'aller te dénoncer. Tu ne pouvais pas. Après tout, ton crime n'a peut-être pas été parfait, mais ils ne t'avaient pas retrouvé. T'allais pas foutre ça en l'air, si ?

Et bien si. T'es allé au commissariat te soulager la conscience. T'as tout déballé, et on t'a rapidement emmené là où ta place se trouve vraiment. En Sibérie. Au bagne, dans les plaines gelées, à te faire saigner les mains, à t'écorcher l'âme. T'es tombé malade. Au milieu des glaces, à force de travaux forcés, tu te doutais bien qu'il ne t'en resterait plus pour longtemps. Tu t'es effondré. Pour de bon.

Et quand tu t'es réveillé, tu n'étais pas en enfer, mais pas au paradis non plus. Tu pouvais encore entendre des prières dans ta tête, celle que Sonia te récitait, pour ta rédemption. Mais en vérité, qu'est-ce que t'en avais à faire, de la rédemption ?

Moi c'est Raz, j'ai 20 ans et je vous ai trouvé en vous stalkant, comme toute personne saine quoi. En vrai je suis débordée de partout mais je pouvais pas passer à côté du forum. Je suis faible. Ça nous arrive à tous.

PS: Rodia c'est le surnom russe pour Rodion, et c'est aussi comme ça qu'on réfère à lui dans le bouquin (quand c'est pas Raskolnikov). Donc rassurez vous, il a pas changé de nom entre le temps que je m'inscrive et que je fasse ma fiche.